Comment réussir son initiation pendant un stage cascade de glace ?
Si vous voulez vous initier à la cascade de glace, alors faire un stage est une très bonne idée ! Ça vous permettra de partir sur de bonnes bases pour découvrir une discipline un peu particulière (on parle quand même d’un loisir qui consiste à grimper sur de l’eau gelée et de brocher avec des moufles).
Mais si vous décidez de vous offrir un stage, il est judicieux d’apprendre la théorie chez soi tranquillement au chaud, et de se servir du stage pour mettre en application vos connaissances.
C’est pour cette raison que j’ai rassemblé ici mes meilleurs conseils pour profiter de votre initiation cascade de glace avec un guide.
Ce que vous apprendrez dans cet article :
- Le jargon du glaciériste, et quel est le matériel incontournable à connaître pour appréhender la discipline.
- Comment grimper en dépensant le moins d’effort possible ?
- Pourquoi chuter est courant en escalade rocheuse, mais fortement déconseillé en escalade sur glace.
P.-S. La cascade de glace n’est pas un sport anodin et nous vous conseillons vivement de faire votre première sortie dans les règles de l’art, avec un guide ou pendant un des événements qui proposent des sessions d’initiation (comme par exemple l’Ecrins Ice Climbing).
Quels sont les prérequis pour profiter pleinement de son stage cascade de glace ?
Faut-il être grimpeur ou alpiniste pour pouvoir faire de la cascade de glace ?
Ça aide mais ce n’est pas obligatoire. La cascade de glace est un sport dérivé de l’escalade. De nombreuses manipulations de corde sont communes aux deux disciplines. En d’autres termes, si vous faites un stage cascade de glace, apprenez au préalable à vous encorder, à assurer un binôme, à lover une corde. Un petit passage en salle d’escalade est idéal pour ça.
La cascade de glace est également une discipline qui appartient à la grande famille de l’alpinisme. En effet, pendant une course en montagne, vous pouvez avoir un passage en glace et vous utilisez alors ce que vous avez appris en cascade. Certains alpinistes pratiquent la cascade de glace notamment pour gagner en aisance et pouvoir réaliser certaines courses d’alpinisme.
Enfin, pour pouvoir s’entraîner l’été, les amateurs de cascade de glace ont inventé le dry tooling qui consiste à grimper sur du rocher à l’aide de crampons et piolets.
Connaître le jargon du glaciériste
Comme je le disais précédemment, le guide qui encadrera votre stage cascade de glace utilisera tout un vocabulaire commun à l’escalade : assurer, faire relais, grimper en tête ou en second, grimper en moulinette… Pour ne pas être perdu, vous pouvez retrouver la signification de ces termes ici.
Certains mots de vocabulaire sont cependant spécifiques à la cascade de glace et il est judicieux de les connaître si vous comptez faire un stage cascade de glace. Il y a par exemple :
- La cotation exprimée en Degrés (1 à 7) qui indique la cotation technique, ou exprimée en Grades (I à VII) qui indique la difficulté globale.
- Le verbe « brocher » qui signifie mettre une broche à glace dans la paroi pour sécuriser la progression du grimpeur de tête.
- Un abalakov, il s’agit d’une boucle de cordelette qu’on passe dans la glace, pour installer un point de protection. Le nom vient de son inventeur Vitali Abalakov, un alpiniste soviétique qui l’a mis au point dans les années 30.
- Une glace bleue désigne une glace froide et bien dense par opposition à une glace blanche qui montre que la glace est aérée et fragile.
- Une cloche est une zone où la couche de glace est plus mince à cause du débit de la cascade, par opposition aux cascades formées par ruissellement.
- Un spindrift est une coulée de neige accumulée en haut de la cascade par le vent et qui tombe à un moment par gravité.
- Et en bonus : les « crabes », terme familier pour parler des crampons, et les « piochons » pour parler des piolets.
Connaître le matériel
En plus de votre matériel habituel en escalade ou alpinisme (baudrier, casque, système d’assurage, mousqueton, dégaine…), vous aurez besoin de :
- deux piolets-traction, vous pouvez retrouver notre article dédié aux piolets ici ;
- des chaussures d’alpinisme prévues pour l’hiver ou des chaussures de ski de randonnée ;
- une paire de crampons (idéalement des crampons prévus pour la cascade, mais vous pouvez débuter avec vos crampons d’alpinisme s’ils sont en acier) ;
- un ou deux carry-tools prévus pour accrocher facilement les broches à glace à votre baudrier ;
- plusieurs paires de gants chauds (car ils seront rapidement mouillés et les extrémités se refroidissent très vite en cascade) et des vêtements chauds et imperméables ;
- un pack DVA-Pelle-Sonde selon les conditions du manteau neigeux.
Conseil bonus : n’oubliez pas de prendre un thermos pour boire un thé ou un café chaud dès que l’occasion se présente.
Enfin, le guide de votre stage cascade de glace fournira : les broches à glace, les dégaines, et les cordes à double de 60 m avec un traitement spécial pour qu’elles n’absorbent pas trop l’humidité.
Les gestes de base à maîtriser en cascade de glace
Grimper
Le principe de base est le même qu’en escalade : grimper en poussant sur ses pieds plutôt qu’en essayant de tirer sur ses bras. Les piolets ne servent qu’à s’équilibrer.
La position idéale est la suivante :
- les pieds écartés au minimum largeur de bassin pour améliorer votre équilibre ;
- les talons vers le bas pour éviter de glisser et pour fatiguer le moins possible ses mollets ;
- les jambes légèrement fléchies et les hanches vers la paroi ;
- les bras tendus au-dessus de votre tête, sans être crispés.
On a généralement tendance à « frapper fort » dans la glace avec ses crampons pour se rassurer. Inévitablement ça consomme plus d’énergie et ça va vous fatiguer prématurément. C’est plus facile à dire qu’à faire, mais gardez à l’esprit que vous n’avez pas besoin de frapper fort pour faire rentrer correctement vos crampons dans la glace. Vous pouvez d’ailleurs, si la paroi s’y prête, chercher de petits ressauts où poser vos crampons. Certains exercices dits « sans piolet » peuvent vous aider à travailler le geste au niveau des pieds.
Planter le piolet
Avant de planter, il faut viser. Pour cela, on peut s’aider en simulant la frappe, c’est-à-dire en faisant un geste sans réellement taper la glace. Simuler la frappe avant de réellement frapper est assez utile quand on débute.
Essayons maintenant de décomposer le geste du planter de piolet :
- armez le piolet légèrement derrière l’épaule (sans descendre trop bas pour ne pas vous fatiguer inutilement) ;
- mettez le piolet et la lame dans l’axe selon lequel vous allez frapper ;
- d’un seul geste, abaissez l’épaule et effectuez une petite rotation du poignet pour frapper un coup sec dans la glace (le fameux « fouetté du poignet »).
Brocher, si on grimpe en tête
Une fois que vous serez suffisamment à l’aise avec le geste de base, le guide pourra vous montrer comment mettre une broche dans la glace. Savoir brocher est un prérequis pour pouvoir grimper en tête en cascade de glace. On s’entraîne au préalable au pied de la falaise pour créer quelques automatismes.
La chute étant interdite en cascade de glace, brocher est un geste qui demande une certaine maîtrise. Déjà car vous devrez lâcher un de vos piolets, ensuite parce que c’est un geste fatigant et qu’on doit le faire au bon endroit dans sa progression.
Voici les 4 étapes présentées sur cette illustration qui résume la pose d’une broche à glace :
- l’angle de vissage de la broche doit être de 90° par rapport à la surface de la glace ;
- on amorce la broche, c’est-à-dire qu’on la fait suffisamment rentrer dans la glace pour qu’elle tienne seule ;
- on visse à pleine main en faisant 2 ou 3 demi-tours (attention à ne pas la faire tomber) ;
- on ouvre la manivelle et on visse la broche jusqu’à la garde, en plaçant l’anneau vers le bas.
Comment être en sécurité en cascade de glace ?
Vous vous demandez si la cascade de glace est un sport dangereux ? Faisons une réponse d’alpiniste normand : c’est un sport qui comporte des risques, mais ça dépend également beaucoup de votre comportement. En cascade de glace comme en alpinisme, il est possible d’adopter certains comportements qui limitent les risques. Pour cela, il est judicieux de connaître les principaux risques en cascade de glace et comment les prévenir.
La chute du grimpeur
Contrairement à l’escalade sportive, en cascade de glace la chute est interdite. Si vous tombez alors que vous grimpez en tête, vous risquez de :
- vous abîmer les chevilles, car elles absorberaient brutalement toute l’énergie cinétique quand les crampons mordront la glace au moment de la réception ;
- faire tomber vos piolets sur un second de cordée ou bien de vous planter un piolet sur vous-même ;
- arracher les broches dans le pire des cas.
Faites donc bien attention à ne pas grimper jusqu’à l’épuisement et à bien connaître vos capacités de grimpe. Le comportement le plus raisonnable est d’augmenter progressivement le niveau de difficulté. Ça semble évident, mais ce n’est pas toujours mis en application.
La chute de glace
Un grimpeur situé au-dessus de vous peut, par mégarde, décrocher un bloc de glace. Or, même un glaçon de la taille d’une balle de tennis lancé à 50 mètres de haut peut faire pas mal de dégâts.
Veillez donc à ne pas vous situer dans l’axe d’un autre grimpeur et renoncez à faire une voie s’il y a déjà beaucoup de grimpeurs dedans. Et évidemment, mettez un casque…
Les coulées de neige
Les cascades sont souvent de beaux couloirs d’avalanche. Or, vous vous en doutez, une coulée de neige qui vous arrive dessus pendant que vous grimpez, ce n’est pas une bonne nouvelle. Veillez donc à bien vérifier le BERA, le relief situé au-dessus et l’orientation de la cascade. Pendant un stage cascade de glace avec un guide, vous n’aurez pas à gérer cette partie.
Comment savoir si une cascade est suffisamment formée ?
Cela prend du temps de savoir évaluer l’état de la glace et ce n’est pas une compétence que vous aurez acquise à la fin d’un stage d’initiation en cascade de glace. Pour vous donner quelques éléments de contexte, sachez que la solidité de la glace évolue en fonction de la température. C’est entre 0° et –3° que la glace se forme le mieux.
Des températures très froides rendent la glace dure et cassante. À l’inverse, des températures plus élevées donnent une glace plus humide et friable (« sorbet »). En toute logique, les variations importantes de température peuvent rendre les cascades dangereuses puisqu’elles présentent un risque d’effondrement.
Pourquoi renoncer est-il plus difficile en cascade de glace ?
On n’a pas souvent l’occasion de faire de la cascade de glace, car les bonnes conditions sont de plus en plus éphémères. Cela provoque un biais psychologique bien connu des alpinistes : l’effet de rareté. On ne veut pas louper le créneau et on se retrouve donc à ignorer les signaux qui nous indiquent les risques (glace pas assez formée, surfréquentation, risque avalanche…). Revenez à l’outil du 3×3 si vous avez besoin de cadrer votre prise de décision.
Conseil bonus : comment ne pas avoir trop froid ? En cascade de glace, on est souvent à l’ombre et on passe de longues minutes à attendre sans bouger. Par exemple, dès qu’on assure son compagnon de cordée. Pour vous éviter de passer un mauvais moment à cause du froid, retenez ceci :
- quand vous changez de gants (car ils sont mouillés), faites-les sécher sur vous en les mettant sur votre torse entre votre 1re et votre 2e couche de vêtements ;
- prenez des chaufferettes pour les pieds et les mains si vous craignez vraiment le froid ;
- ne lésinez pas sur le nombre et la taille des doudounes, il faut s’habiller bien plus chaudement que pour du ski de randonnée ;
- couvrez-vous lorsque vous assurez, et enlevez une couche lorsque vous grimpez.
Auteur : Emilie Lechevalier
Néo-montagnarde, je me suis installée en Savoie en 2017 et j’y ai découvert l’alpinisme et le ski de randonnée.
Depuis, j’aime les cordées qui respectent les temps du topo, le gling-gling du matos qui pend au baudrier au départ d’une voie, les cordes lovées avec amour et les peaux de phoque qui collent juste ce qu’il faut…
Parmi mes plus beaux souvenirs de montagne, il y a : d’interminables bambées dans les Écrins, des grandes voies au-dessus de la mer à l’automne et de trop courtes journées de peuf entre copains.
Mais il y a aussi toutes ces heures passées à préparer des courses, à réviser des manips de corde dans mon salon et à discuter de la complexité du facteur humain.
C’est pourquoi, une fois le piolet rangé : le stylo prend le relais, pour partager des récits de voyage à la verticale mais aussi des conseils pour progresser.
C’est ainsi que je suis devenue rédactrice spécialisée dans les sports de montagne et auteure du Carnet Montagne.
Retrouvez mes courses en montagne sur le compte Instagram @lesdirtbags
Et pour aller plus loin, c’est par ici : https://emilie-lechevalier.fr/