Comment lire un topo d’alpinisme pour préparer sa course en montagne ?
Le topo-guide d’alpinisme, plus souvent appelé topo d’alpinisme, est un texte imprimé ou en ligne qui décrit précisément un itinéraire en randonnée, une voie d’escalade ou une course en montagne. La lecture du topo est donc le point commun entre les randonneurs, les grimpeurs et les alpinistes.
Rédigé par des guides ou des personnes aguerries à la montagne, le topo d’alpinisme a pour but de transmettre l’expérience et la connaissance des itinéraires de haute montagne.
Ces informations sur la course sont très précieuses. C’est pourquoi la lecture du topo d’alpinisme est une étape incontournable de la préparation de la course (également appelée « prépa de course »). Grâce au topo vous pourrez partir en montagne en sachant ce qui vous attend et donc :
- savoir si vous avez le niveau pour cette course ;
- mettre l’équipement adéquat dans votre sac ;
- préparer votre stratégie de progression.
Où trouver un topo d’alpinisme ?
CampToCamp : première source d’information
CampToCamp (C2C, pour les intimes) est un topo-guide numérique qui recense un très grand nombre d’itinéraires et de pratiques (grandes voies, alpinisme, ski…). C’est une vraie mine d’informations, incontournable pour la plupart des alpinistes.
Sur les topos CampToCamp, le premier encart vous indique de nombreuses informations factuelles : cotation, dénivelé, altitude, orientation…
Dans la rubrique cotation, la cotation globale (de F pour facile à ABO pour abominable) est indiquée en premier. Mais c’est loin d’être une indication suffisante pour préparer votre course. Il est donc essentiel de lire les détails de la cotation pour comprendre ce qui fait la difficulté de la course. Voici les principaux critères à savoir interpréter :
- la cotation libre (de 2 à 9c), c’est la difficulté maximale de l’escalade libre rocheuse (escalade libre = sans possibilité de s’aider de matériel pour progresser, c’est l’opposé de l’escalade artificielle) ;
- la cotation obligatoire (de 2 à 9c), il s’agit de la difficulté obligatoire, c’est-à-dire sans possibilité de « tricher » en utilisant un point pour s’aider : par exemple, en tirant au clou ou en posant une pédale ;
- l’engagement (de I à IV), cela correspond au degré de mise en danger de l’alpiniste en cas de problème. Les critères principaux pris en compte sont l’éloignement de la civilisation (refuge, vallée, etc.), les possibilités d’échappatoires ou de redescente… ;
- les risques objectifs (de X1 à X5), les risques pris en compte sont les avalanches naturelles de neige, les chutes de séracs, les chutes naturelles de pierres et la fragilité du support ;
- la qualité de l’équipement (de P1 à P4+), qui définit la quantité de matériel (pitons, friends, coinceurs, sangles…) à emporter et le savoir-faire nécessaire pour l’utiliser. P1 correspond aux grandes voies d’escalade avec spit ou goujon et relais en place. Il faut alors simplement prendre des dégaines ;
- l’exposition rocher (E1 à E6), cela renvoie aux conséquences qu’aurait une chute sur l’intégrité physique du grimpeur. À partir de E4, la chute ne sera pas bénigne, des blessures graves ou mortelles sont à envisager.
- la cotation glace (de 3 à 7), qui indique la difficulté des passages en glace.
Pour en savoir plus le sur le fonctionnement des cotations C2C : https://www.camptocamp.org/articles/1201049/fr/aide-topoguide-cotations
L’avantage des topos papier
Le principal avantage des topos papier est le travail de sélection réalisé par son (ou ses) auteur(s). Là où sur CampToCamp vous pouvez vous sentir noyé sous le nombre de courses et d’informations présentées, dans un topo, l’auteur vous propose une sélection des plus belles voies.
Voici 3 topos papier incontournables que tous les alpinistes débutants doivent avoir dans leur bibliothèque :
- Alpinisme facile dans le massif des Écrins, Éditions Glénat
- Sommets du Mont-Blanc, Éditions Glénat
- Voies normales et classiques des Écrins, Éditions Constant
2 topos rochers sont également un excellent premier investissement : Escalade plaisir Alpes du Sud et Escalade Plaisir Alpes françaises du Nord. Contrairement à ce qu’on pourrait croire, il n’y a pas que des grandes voies équipées dans ces topos. Bien au contraire ! De très belles voies en TA (Terrain d’Aventure) mais aussi d’incontournables courses d’arêtes sont présentées dans ces topos : aiguilles de la Vanoise, Dibona, arêtes de la Bruyère, pic Gény… Parfaits donc pour l’alpinisme rocheux.
Les informations à chercher sur un topo d’alpinisme
La cotation, mais pas seulement
Nous l’avons vu, les cotations sont souvent les premières choses qu’on regarde. Cela donne une vue d’ensemble des difficultés. Mais quand on s’engage dans une paroi alpine, on a besoin d’informations détaillées sur l’itinéraire et l’équipement en place.
C’est pourquoi on ne s’arrête surtout pas à la cotation globale, mais pas non plus à la cotation détaillée. L’altitude et le dénivelé de la course jouent également un rôle important dans la difficulté de la course. Grimper du 5c à 300 mètres ou à 2 800 mètres, avec 10 minutes d’approche ou avec 1 200 mètres de D+ dans la journée, ce n’est pas du tout la même chose. Relativisez toujours les difficultés en regardant l’altitude et le dénivelé à parcourir.
Le descriptif
Après les informations factuelles, on lit ensuite le descriptif de l’itinéraire. Cela permet d’identifier les passages clés. 2 options sont possibles :
- vous avez le niveau pour passer les passages clés (ex. : passer cette rimaye, grimper cette cotation à cette altitude…) ;
- vous n’avez pas le niveau, dans ce cas, demandez-vous si le topo indique que les passages difficiles peuvent être contournés. Sinon, changez de projet.
Si vous avez le niveau pour l’objectif que vous avez choisi, alors il faut commencer à préparer l’itinéraire. Pour cela, ouvrez Géoportail ou sortez une carte IGN pour localiser sur la carte l’itinéraire de la marche d’approche, la voie en elle-même et la descente.
Essayez de localiser les points clés tels que l’attaque de la voie, les réchappes possibles, le crux… Sur certains topos d’alpinisme ou d’escalade, des dessins et croquis vous aident à visualiser les différents passages et points clés.
Information à lire entre les lignes
Enfin, la difficulté d’une course en montagne peut changer selon les conditions sur le terrain.
Voici quelques exemples :
- le regel nocturne ou la quantité de neige changeront drastiquement la difficulté d’un couloir en neige ;
- la présence de neige sur une arête peut être un avantage s’il y a beaucoup de neige, et un désavantage si cela ne fait que cacher les points en place et rendre la pierre plus glissante ;
- la solidité des ponts de neige sur un glacier…
Pour avoir ces informations terrain, vous pouvez demander au gardien du refuge le plus proche de la course, regarder les dernières sorties publiées sur CampToCamp ou le site de la Chamoniarde pour les courses dans le massif du Mont-Blanc.
Conseil bonus : il est judicieux de confronter plusieurs topos (numériques et papier)
Lors de votre préparation de course, il est conseillé de comparer les topos numériques et les topos papier. Par exemple, la cotation globale entre les topos papier et numériques peut varier. Cela vous permettra d’avoir plusieurs sources d’information sur votre course et vous aidera à la préparer avec un maximum d’éléments.
Comment utiliser le topo dans votre prépa de course ?
La lecture du topo d’alpinisme vous permettra de répondre à 3 questions essentielles de la préparation d’une course.
- Est-ce que la course est à mon niveau (dans les conditions terrain actuelles) ?
- Si oui : quel matériel dois-je emporter pour réaliser cette course en toute sécurité ?
- Enfin : quelle stratégie vais-je adopter pour réussir cette course ?
Savoir si la course est dans votre niveau et si elle est faisable en ce moment
À la lecture du topo, pour savoir si une course d’alpinisme est à votre niveau, vous pouvez vous poser ces 5 questions (+ 1 optionnelle) :
- Ai-je déjà réalisé plusieurs courses avec ce niveau de cotation ?
- Suis-je à l’aise avec les techniques de progression et d’assurage pour ce type de course ? (Exemple : pose de point, rappel, assurance en mouvement…)
- Ai-je suffisamment de marge avec les difficultés de l’itinéraire ? (Exemple : niveau de grimpe, aisance en glace, lecture du glacier, etc.)
- Ai-je déjà réalisé des courses avec le même dénivelé ?
- Est-ce que j’arrive à respecter habituellement les temps indiqués sur le topo pour ce type de course ?
- Optionnelle : Suis-je acclimaté à l’altitude en ce moment (si la course se déroule en altitude) ?
Si vous répondez à toutes ces questions par une grande majorité de oui, alors vous avez certainement choisi une course adaptée à votre niveau (et à celui de votre cordée).
Si vous avez répondu à toutes ces questions par une grande majorité de non, alors prenez une course plus facile.
Choisir son matériel
La lecture du topo d’alpinisme vous indique l’équipement en place ainsi que les difficultés que vous allez rencontrer. C’est ce qui va vous permettre de savoir ce que vous devez mettre dans votre sac.
Voici quelques exemples :
- le matériel de sécurité et de progression sur glacier ;
- des pitons, friends, coinceurs sangles pour les itinéraires peu équipés.
Sur les courses d’initiation, il n’est pas rare que le topo CampToCamp détaille le matériel à prendre pour une cordée.
Préparer la stratégie à adopter
Enfin, la lecture du topo vous permet d’établir votre stratégie de course. Pour cela vous devez :
- identifier les différentes séquences de l’itinéraire et déterminer la méthode de progression pour chaque séquence (ex. : pour ce passage en 4c en chaussures d’alpinisme, il faudra tirer une longueur pour plus de sécurité, car le grimpeur a plus de risques de tomber ; l’assurage en mouvement serait dangereux au regard du niveau de grimpe de la cordée) ;
- prévoir la durée de chaque séquence pour définir un horaire de départ et de retour que vous communiquerez à quelqu’un qui reste en sécurité ;
- identifier les points de décision où vous devrez réaliser un 3 x 3 – à certains endroits (exemple : avant de s’engager dans une portion sans réchappe) ou à certains moments (exemple : à 10 h, pour pouvoir redescendre sur le glacier avant qu’il ne chauffe…) ;
- localiser les réchappes, s’il y en a ;
- préparer un plan B si vous devez renoncer au plan A une fois sur le terrain.
Maintenant que vous savez où trouver un topo d’alpinisme, les informations que vous devez y chercher et comment préparer votre course d’alpi avec ces éléments…, il ne vous reste plus qu’à aller feuilleter des topos pour choisir les courses qui vous font rêver.
Auteur : Emilie Lechevalier
Néo-montagnarde, je me suis installée en Savoie en 2017 et j’y ai découvert l’alpinisme et le ski de randonnée.
Depuis, j’aime les cordées qui respectent les temps du topo, le gling-gling du matos qui pend au baudrier au départ d’une voie, les cordes lovées avec amour et les peaux de phoque qui collent juste ce qu’il faut…
Parmi mes plus beaux souvenirs de montagne, il y a : d’interminables bambées dans les Écrins, des grandes voies au-dessus de la mer à l’automne et de trop courtes journées de peuf entre copains.
Mais il y a aussi toutes ces heures passées à préparer des courses, à réviser des manips de corde dans mon salon et à discuter de la complexité du facteur humain.
C’est pourquoi, une fois le piolet rangé : le stylo prend le relais, pour partager des récits de voyage à la verticale mais aussi des conseils pour progresser.
C’est ainsi que je suis devenue rédactrice spécialisée dans les sports de montagne et auteure du Carnet Montagne.
Retrouvez mes courses en montagne sur le compte Instagram @lesdirtbags
Et pour aller plus loin, c’est par ici : https://emilie-lechevalier.fr/