Comment gérer le risque avalanche quand on est débutant en ski randonnée ? PARTIE 2/2

Comment gérer le risque avalanche quand on est débutant en ski randonnée ? PARTIE 2/2

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Dans la partie 1 de cet article nous avons analysé les principaux facteurs mécaniques et thermiques qui conduisent au « déséquilibre du manteau neigeux » plus communément appelée « avalanche ».

Pourtant être enseveli sous une avalanche est bien souvent causé par de « mauvaises décisions humaines » que par des facteurs mécaniques et thermiques.

C’est pourquoi connaître les situations à risque et comprendre le fonctionnement des avalanches est essentiel mais doit impérativement être intégré à une méthode de prise de décision.

Il semblerait que nous ne soyons pas des êtres rationnels évoluant en pleine conscience dans un environnement prévisible… Et non…

Pourquoi faut-il une méthode ?

Premièrement, il arrive que le risque avalanche ne soit pas visible à l’œil nu sur le terrain. La préparation en amont d’un certain nombre d’éléments est donc vitale.

Deuxièmement, l’envie d’aller au sommet, de suivre un groupe, ou de se faire plaisir dans la poudre a souvent tendance à masque les signes objectifs de danger. C’est ce qu’on appelle les biais de l’inconscient, ils sont nombreux en ski de randonnée et nécessite de rationaliser le processus de décision.

C’est pourquoi les skieurs de randonnés initiés utilisent (consciemment ou non) la méthode du 3 X 3 pour réduire le risque d’être enseveli sous une avalanche. Cette méthode permet adapter son comportement et son itinéraire en fonction des éléments connus et observables, avant et pendant la sortie.  

Faire des choix dans un environnement risqué   

Connaître avec précision la nature des couches de neige qu’on a sous les pieds est impossible. Et de toute façon, le déclenchement d’une avalanche reste en partie imprévisible. Le facteur sur lequel on peut influer en revanche c’est humain qui fait des choix : choix d’un itinéraire plutôt qu’un autre, choix d’un horaire de départ, choix du nombre de participant, choix d’un comportement plutôt qu’un autre sur le terrain…

C’est en partant de cette réflexion que le guide suisse Werner Munter a établi la méthode 3 X 3, une méthode de réduction du risque avalanche pensées pour le ski de randonnée.

Il s’agit de s’interroger sur trois séries de variables :

  • les conditions (ciel, neige) ;
  • le terrain (relief, orientation des pentes, degrés de pente..) ;
  • l’humain (état physique, niveau technique…).

Et d’interroger ces trois éléments à trois moments successifs :

  • chez soi pendant la préparation ;
  • au départ sur le terrain ;
  • autant de fois que nécessaire pendant la course.

Comment appliquer le 3 X 3 de A à Z ?

1ere étape du 3 X 3 : la préparation de course spécifique au ski de randonnée

Commençons par vérifier la météo

C’est la première chose à regarder, il faut savoir si la météo permet de sortir en montagne. S’il fait beau : bonne nouvelle ! En revanche :

  • le brouillard peut être très dangereux car si vous ne voyez pas à 3 mètres, vous ne pourrez pas voir l’état des pentes qui vous surplombent pendant une course. Vous risquez par exemple de passer au mauvais endroit.
  • le vent peut alourdir le manteau neigeux (sur les corniches par exemple), il peut être éreintant, entrainer un hypothermie ou encore vous faire chuter.
  • la pluie ou la neige peuvent alourdir le manteau neigeux et faire partir des avalanches.
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Enfin, la température a également une influence sur le manteau neigeux. Si la neige se réchauffe, alors elle s’humidifie et s’alourdit, pouvant entraîner une avalanche.  

Il est conseillé de vérifier la météo sur plusieurs sites pour comparer plusieurs modèles. Voici les sites que j’utilise :

Où trouver le BERA (Bulletin d’Estimation du Risque Avalanche) ?

Une fois la météo vérifiée, il est temps de lire le Bulletin d’Estimation du Risque Avalanche est publié chaque jour autour de 16h par Météo France pendant toute la saison de ski. Cela vous permet de connaître :

  • le niveau de dangerosité du manteau neigeux (indiqué selon un chiffre qui va de 1 à 5) ;
  • les caractéristiques du manteau neigeux et donc les situations qui sont plus à risque (quelles orientations et quelle altitude éviter).

Vous vous demandez où trouver le BERA ? Rendez-vous ici, il vous suffit alors de choisir votre zone géographique puis le massif concerné.

ATTENTION : Il ne faut surtout pas vous limiter à la lecture du chiffre mais bien lire les détails du BERA pour savoir à quel type de situation avalancheuse vous avez à faire et les zones (altitude, pente, exposition) les plus à risque pour les éviter. Ne lire que le chiffre est une erreur commise par beaucoup de débutants.

Pour vous aider à lire et comprendre le BERA, l’ANENA a proposé une grille d’analyse qui permet de chercher les indications utiles.  

Que signifie les degrés de danger ?

Revenons sur les 4 situations avalancheuses identifiées dans cet outil d’évaluation du BERA.

  • Neige fraîche : il s’agit de neige pas encore transformée (donc de la neige récente) présente en grande quantité et qui manque d’adhérence sur un fond dure.
  • Neige ventée ou neige soufflée : le vent peut transporter de grande quantité de neige. En fonction de l’orientation du vent, cette situation crée des accumulations de neige dans certain endroit. Sous l’effet du vent, il peut arriver que la neige se compacte, formant ainsi des « plaques à vent ». Difficile à identifier cette situation avalancheuse présente un danger majeur.
  • Sous-couches fragiles persistantes : une plaque de neige se décroche en raison de la rupture d’une couche fragile située en dessous. C’est un danger difficile à évaluer car les sous-couches fragiles sont invisibles. C’est la première cause d’accidents en avalanche.
  • Neige humide : il peut s’agir de la fonte de la neige ou de la pluie. Dans les deux cas, cela alourdit le manteau neigeux et peut entraîner son déséquilibre.
  • Avalanche de glissement : cela signifie que le manteau neigeux peut glisser sur le sol. Cela a lieu le plus souvent sur des surfaces lisses (pentes d’herbe ou dalle à faible rugosité).

A l’issue de votre analyse de BERA, vous avez identifié : les altitudes, les orientations et le degré de pente à viser pour rester en sécurité. Vous pouvez maintenant choisir votre itinéraire en fonction de ces éléments.

Exemple :

Analyse du BERAChoix d’itinéraire
Risque 4 au-dessus de 2400 m d’altitude, rosace noire en nord, couches fragiles persistantes.Je suis initié, peux envisager d’aller du côté de Grand Nâve dans le massif du Beaufortain pour rester loin des pentes à plus de 30°. Ou Je suis débutant en ski de randonnée, en risque 4, je décide de ne pas sortie.  
Risque 2, rosace noire en S, neige humideSi je pars tôt le matin, je peux monter au rocher Blanc en passant par la combe Madame (orientation NO) puis en remontant le versant NE du Rocher Blanc.  

Récupérer des informations terrains

Une fois les informations analysées sur le BERA, il peut être utile de les confronter aux informations récoltées sur le terrain grâce à :

  1. Skitour. C’est un site communautaire pour le ski de randonnée. Ses membres publient régulièrement des compte-rendu de sortie dans lesquels ils indiquent les conditions d’enneigement qu’ils ont pu constater à un endroit donné. Ils précisent souvent si la neige était bonne à skier, mais aussi les risques avalancheux constatés (coulées, plaques…).
  2. Au gardien de refuge. Lorsque les refuges d’hiver sont gardés, le gardien est également le bon interlocuteur pour vous faire un retour sur le risque avalanche dans une secteur donné.
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Analyser le degré de pente est le cœur de votre sujet

Vous l’aurez compris, un des moyens les plus efficaces de réduire votre risque est de jouer sur de degré de pente de votre itinéraire. Plus de risque BERA est élevé, plus il faut vous méfier des pentes entre 30° et 45°

Dans le graphique qui suit,

  • l’ordonnée (axe vertical) indique le degré de pente (sur la trace, 20 mètres autour de la trace et sur toute la pente) ;
  • l’abscisse (axe horizontal) indique le degré de dangerosité du BERA ;
  • enfin, les petits chiffres dans les zones de couleur représentent les accidents avalanche sur la période 2002-2015.

On constate que la plupart des accidents surviennent dans des pentes entre 35° et 40°, sur un risque 3 tendant vers le 4. Par rapport à ce graphique, il faut arriver à rester dans la zone verte (si vous êtes débutant), dans la zone verte ou jaune (si vous êtes initiés). Ainsi, si vous êtes débutant en ski de randonnée, à partir du risque dit « marqué » (3 sur 5), il faut éviter d’être sur ou sous des pentes à plus de 30°. 

Pour cela, l’outil le plus adapté est la carte des pentes disponible sur Géoportail.

Cet outil vous permet de superposer la carte des pentes sur une carte IGN. Vous pouvez ainsi regarder le tracé de votre itinéraire en ski de rando (tracé bleu foncé sur les cartes IGN) et voir s’il passe sur ou sous des pentes élevées.

Exemple :

Sur la crête sommitale du Grand Som, un passage est particulièrement raide et difficilement contournable. Il est alors judicieux de terminer la course au col et de ne pas aller jusqu’au sommet si le BERA est élevé.

Carte IGN du Grand Som
risque avalanche
Carte IGN du Grand Som avec la carte des pentes

Et un peu de bon sens dans tout ça ?

Tous nos outils numériques ne doivent pas nous empêcher de faire marcher notre bon sens. Par exemple :

  • attendez quelques jours que le manteau soit purgé après une grosse chute de neige ;
  • ne partez pas seul ;
  • signalez votre itinéraire et l’heure approximative de votre retour.
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Évaluer le risque avalanche au départ de l’itinéraire

Au départ de votre sortie, donc dès que vous arrivez sur le terrain, il est important de réévaluer la situation par rapport aux éléments du jour. Votre préparation de course est une chose importante, mais ce n’est pas un plan gravé dans le marbre. Au contraire, savoir adapter ses plans à la situation réelle est le nerf de la guerre en montagne.

Ainsi, au départ il est important de :

  • s’interroger sur l’état de forme des participants ;
  • regarder la météo réelle par rapport à la météo prévue ;
  • identifier la présence de coulées, de fissures sur le manteau neigeux,
  • vérifier que le DVA de chaque participant fonctionne ;
risque avalanche
Recherche fine avec un DVA

Analyser le risque avalanche pendant la course

« il vaut mieux analyser une pente pendant trente secondes que creuser pendant trente minutes » disait Werner Munter l’inventeur du 3 X 3.

Cela signifie que dans les passages à risque, il faut prendre le temps d’évaluer les risques avalanche en utilisant la méthode du 3 X 3.

Pendant votre course, pour compléter les informations collectées pendant votre préparation de course, vous devez être à la cherche de signes observables. Il arrive parfois :

  • d’entendre des « WHOUMPF » à son passage qui indiquent la présence de couches fragiles ;
  • de voir des coulées ou des avalanches récentes ;
  • de voir des « gueules de baleine », c’est-à-dire des fissures qui indiquent un risque d’avalanche de glissement.
Gueule de baleine neige avalanche
Une belle « gueule de baleine » – photo : B.Jelk, 09/03/2018

Après avoir analysé le terrain, l’humain et les conditions pendant votre course, vous pouvez décider de :

  • prendre des distances entre les participants (à la montée et/ou à la descente) pour éviter d’exercer une trop grande pression sur le manteau et éviter que plusieurs personnes soient pris dans la même avalanche ;
  • faire demi-tour si la poursuite de l’itinéraire est trop risqué.

Une des erreurs fréquentes sur le terrain est de penser que « parce que c’est tracé, ce n’est pas dangereux ». C’est évidemment faux puisqu’une avalanche ne se déclenche pas forcément aux premiers passages et que le manteau neigeux évolue constamment.

Pour aller plus loin…

Le site de référence pour continuer à vous former au risque avalanche est évidemment celui de l’ANENA . Une vaste documentation est disponible en ligne pour creuser certains sujets liés à l’avalanche. Une chose reste à garder en tête en matière d’avalanche : chaque année des personnes avec de nombreuses connaissances en nivologie se retrouvent enfouis. Les connaissances techniques sont essentielles mais ne valent pas grand-chose en matière de gestion du risque avalanche sans une méthode comme le 3 X 3.

 

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