Comment réussir sa première course d’alpinisme sans guide ?

Comment réussir sa première course d’alpinisme sans guide ?

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Quand on part en montagne avec un(e) guide ou qu’on part accompagné d’un ami très expérimenté qui nous chaperonne, alors sans même le vouloir, on se laisse un peu porter… Au moment de prendre une décision, on laisse au plus expérimenté la responsabilité de choisir. Résultat ? On reste toujours un peu dépendant, incapable de prendre des décisions, et l’autonomie semble être un objectif hors d’atteinte.

Après quelques sorties avec un(e) guide, quand vient le temps des premières courses en autonomie, il est normal d’hésiter, de se tromper et de se demander si on est vraiment prêt… Mais tous les alpinistes expérimentés vous le diront : pour être autonome, il faut se lancer et partir encordé avec quelqu’un du même niveau que vous ! Alors oui, on se lance, mais en respectant la politique des petits pas, c’est-à-dire dans une course où vous avez de la marge et en ayant les bases pour vous en sortir. Pour vous aider à sauter le pas, reprenons donc ensemble les étapes incontournables pour réussir votre première sortie d’alpinisme sans guide.

Pourquoi faire une sortie d’alpinisme sans guide est-il effrayant ?

Comme disait un grimpeur peu conventionnel mais célèbre : “un grand pouvoir implique de grandes responsabilités” 🕷️. En alpinisme, cela signifie que les choix (plus ou moins conscients) que nous faisons peuvent avoir des conséquences dramatiques. Or, lorsque vous partez en autonomie, vous ne pouvez tout simplement plus vous reposer sur quelqu’un. Vous allez devoir faire des choix et les assumer.

Avancer en corde tendue ou tirer une longueur ?
Contourner le gendarme par la gauche ou par la droite ?
Remonter dans le couloir en neige ou prendre la vire caillouteuse sur le côté ?
Taper un rappel ou désescalader ? 
Mettre un point maintenant ou continuer d’avancer ?
Continuer d’avancer ou prendre une réchappe ?

Les questions qui peuvent se poser lors d’une course d’alpinisme sont nombreuses. Ainsi, ce qui paralyse véritablement un débutant, c’est la peur de se tromper et que cette erreur conduise à un accident.

Pour vous aider à prendre vos décisions pendant une course d’alpinisme sans guide, vous allez devoir utiliser :

  • votre boîte à outils (encordement, manip de corde, d’assurage, grimpe…) également appelée “la technique” ;
  • votre préparation de course (notamment à l’aide des cartes et des topos) souvent surnommée “la prépa de course” ;
  • votre expérience (c’est-à-dire l’ensemble des situations que vous aurez eu à gérer) et pour cela il n’y a qu’une solution : aller en montagne, retourner en montagne, re-retourner en montagne…

Les prérequis incontournables pour se lancer sans guide

Pour faire sa première sortie d’alpinisme sans guide, il est nécessaire d’avoir quelques premières expériences avec un(e) guide, un ami expérimenté ou un encadrant du Club Alpin Français (CAF), par exemple.

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À l’issue de ces sorties, vous êtes normalement capable :

  • de préparer votre sac. Cela signifie que vous possédez et savez utiliser le matériel de base : corde, baudrier, casque, chaussures d’alpi… Vous pouvez en retrouver ici la liste complète ;
  • de vous encorder (avec et sans anneaux de buste) ;
  • d’assurer en progression (glacier crevassé et rocher facile) et en tirant des longueurs (si le risque de chute est important) ;
  • de protéger en posant des points (câblés, friends, sangles…) ou en utilisant le relief (ce qu’on appelle les béquets) ;
  • de suivre un itinéraire à l’aide du topo et en allant souvent “au plus évident” (surtout dans les courses débutants). Dans les itinéraires fréquentés, vous pourrez également trouver votre chemin à l’aide des pitons, ou autre matériel, laissés dans la voie ainsi qu’en observant l’usure du caillou ;
  • de faire un rappel. C’est une manip commune à la grande voie, avec quelques subtilités propres à la haute montagne pour éviter de coincer la corde.

taper un rappel en alpinisme

Au début, votre longueur de corde ne sera pas toujours optimale et poser des points vous prendra du temps, mais il n’y a pas d’inquiétude à avoir : tout cela est logique. Être lent pour poser un point ne veut pas dire que vous n’êtes pas autonome, cela signifie que vous avez besoin de pratiquer. En revanche, si des termes comme “anneaux de buste” et “béquet” ne renvoient à rien de concret pour vous, alors il est sage de prévoir quelques stages ou sorties avec quelqu’un qui pourra vous enseigner ces techniques de base.

 

Une bonne partie de votre réussite dépend du choix de la course

On ne s’en rend pas toujours compte en sortant avec un(e) guide mais choisir la bonne course peut être un vrai casse-tête. Il faut donc chercher une course adaptée à votre niveau, qui soit en condition (on ne fait pas certaines courses en neige trop tôt ou trop tard dans la saison) et, dans l’idéal, qui ne soit pas trop fréquentée (car la surfréquentation n’est pas seulement pénible, elle peut être dangereuse).
Trouver une course adaptée à votre niveau est toujours vrai mais d’autant plus important si c’est votre première course en autonomie, car il faudra prendre une marge de sécurité.

Pour choisir la bonne course d’alpinisme sans guide, il faudra :

  • être lucide sur vos forces et vos faiblesses. Grimper en tête avec des chaussures d’alpi à 3 000 m d’altitude, ce n’est pas la même chose qu’en salle avec des chaussons. Certains grimpeurs de salles à l’aise dans le 7 ne dépassent pas le 4 en tête avec des grosses aux pieds. Soyez humble et vérifiez toujours sur le terrain votre niveau avant d’augmenter les difficultés. Par ailleurs, nous n’avons pas tous les mêmes atouts. Cela dépend parfois de la discipline qui vous a amené à l’alpinisme. En effet, la rando, l’escalade ou le ski de randonnée ne développent pas les mêmes compétences ;
  • connaître les courses adaptées pour débuter de manière autonome. Pour cela, commencez à éplucher les topos numériques ou les topos papier.
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L’étape essentielle qui échappe à ceux qui sortent habituellement avec un(e) guide : la préparation de la course

Quand on sort en montagne avec un(e) guide, on ne prend pas toujours conscience de l’importance (et du temps nécessaire) à la préparation de la course. C’est pourtant une étape essentielle puisqu’elle vous permettra de prendre de meilleures décisions une fois sur le terrain. Or, nous l’avons vu, savoir faire des choix, c’est bien le défi des alpinistes qui veulent devenir autonomes.

Préparer une course alpinisme sans guide signifie :

  • étudier l’itinéraire sur un topo et sur une carte (papier ou numérique) ;
  • demander aux gardiens des retours du terrain (il vous dira si la course n’est pas faisable à cette période) ;
  • vérifier la météo (en regardant également s’il y a de forts vents, car en altitude c’est très dangereux) ;
  • identifier les difficultés éventuelles et d’anticiper la manière dont on va les passer ;
  • prévoir le matériel nécessaire.

Faire sa course

lecture de l'itinéraire pendant l'approche

Le maître-mot est : pas de précipitation ! Prenez le temps de réfléchir face à une situation délicate. Prendre quelques minutes pour échanger avec son compagnon de cordée peut, au final, faire gagner des heures précieuses. La plupart des accidents en montagne sont le résultat d’une mauvaise prise de décision.

Je ne peux pas vous lister toutes les situations, car chaque course réunit un ensemble de paramètres uniques.

J’ai donc rassemblé ici les accidents qui me sont souvent remontés aux oreilles :

  • Se perdre. La lecture d’itinéraire est centrale dans une course. Se perdre peut s’avérer très dangereux si on se retrouve face à des difficultés qu’on ne sait pas gérer. Pour vous aider, si ce n’est pas votre fort, utilisez l’application Iphigénie (15 euros / an). Elle vous permettra de télécharger au préalable des fonds de cartes IGN et de vous géolocaliser, même hors connexion. Et dans le doute, faites demi-tour si c’est possible.
  • L’accident au moment du rappel. Le rappel est évidemment propice aux accidents. Attention sur ce point : vérifiez plusieurs fois, d’une part, la solidité d’un béquet si vous décidez de taper un rappel dessus ; d’autre part, la manière dont vous passez vos sangles, pour ne pas risquer de faire sauter la sangle une fois pendu dans le baudrier.
  • Envoyer des cailloux à son second de cordée en passant dans un pierrier ou en faisant traîner la corde dans des pierres instables. C’est un classique des débutants, restez aussi vigilant que possible sur ce point, raccourcissez la longueur de corde si besoin.
  • Être à une heure tardive sur un glacier qui chauffe. Soyez intransigeant sur le respect des horaires lorsque c’est une question de sécurité. Si nécessaire, prenez de la marge, partez plus tôt que les cordées expérimentées.

Voici un dernier conseil en ce qui concerne les accidents : en montagne, il n’y a pas de petites flemmes. Dire j’ai la flemme de mettre mes crampons, j’ai la flemme de raccourcir l’encordement, j’ai la flemme de sortir la carte… peut avoir des conséquences terribles. Donc, quand on a la flemme, c’est qu’il faut le faire.

Débriefer et recommencer

Faire des erreurs en montagne est normal, ce qui l’est en revanche moins c’est de faire des erreurs sans en tirer des leçons pour la suite. Pour progresser et tirer un maximum d’enseignements de vos erreurs, il faut prendre le temps d’analyser votre course une fois qu’elle est terminée.

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Pour vous aider à faire ce débrief, voici quelques indicateurs objectifs de votre niveau :

  • Le temps. Demandez-vous : est-ce que j’ai respecté le temps du topo ? Si non, sur quelle portion avez-vous perdu du temps, et pourquoi ? Astuce : la perte de temps peut être due à la lecture d’itinéraire et aux manips de corde.
  • La communication. Combien de points de décision étaient prévus et combien ont été faits ? Est-ce que la communication au sein de la cordée a été constructive et agréable ? Est-ce que chacun a pu donner son avis et s’est senti entendu dans les prises de décisions importantes ?
  • Le matériel. Est-ce qu’il y a eu de la casse ? Une corde abîmée ou des coinceurs perdus ?

Il y a également de nombreux indicateurs subjectifs, à commencer par votre ressenti qui vous permettra d’améliorer de nombreux points : votre équipement, votre alimentation pendant la course, votre choix de compagnon de cordée, votre aisance dans la grimpe… Une infinité de paramètres vont donc s’installer petit à petit. Soyez patients, tout cela viendra au fil de la pratique.


Terminons enfin par une évidence qui mérite d’être rappelée si vous en doutiez encore : le seul moyen de vous améliorer et de progresser vers l’autonomie est de pratiquer l’alpinisme sans guide. Sortez de préférence dans une course facile avec quelqu’un qui a votre niveau. Enfin, souvenez-vous : il est plus facile de faire une course D+ avec un(e) guide que du PD- en autonomie, mais ces courses n’ont pas la même saveur. Je vous souhaite donc de tout cœur que vous ressentirez l’immense satisfaction de réussir votre première course en autonomie.

 

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